« La lune s’est couchée », un court fragment lyrique de la poétesse grecque antique Sappho qui exprime une réflexion nocturne raffinée et mélancolique (1re édition originale : 6e siècle avant J.-C.).
Un bruissement visuel, impétueux, léger et envoûtant, se déplace des yeux du spectateur vers une immense étendue corporelle indéfinie qui enveloppe l’air à l’intérieur et à l’extérieur, entre les interstices de la toile et tout autour, jusqu’à revenir désastreusement à son incarnation matérielle, c’est-à-dire aux doux coups de pinceau des œuvres picturales enveloppantes de Tatiana Defraine. Tout bouge, soutenu par des lignes ondulées et des trajectoires ciblées. Mais d’où viennent ces figures chevauchantes ensorcelées et surtout où vont-elles ? Les voici dans une fenêtre de couleur, capturées dans l’instant intemporel de leur course éternelle, décomplexées, fières et naïves en même temps, filles de la nature qui les enveloppe. Leurs gestes chuchotés et éthérés semblent ne rien faire d’autre que ce que cet instant permet : se produire guidés par des symphonies hédonistes, entre terre et ciel.
Dans Horses and Ghosts, le sol semble trembler sous l’effet de la course audacieuse et trotteuse, en parfaite harmonie avec le rythme typique du vol des feuilles des arbres, là où, animées par le vent impétueux, tout danse. Dans cette succession de scènes métaphoriques au caractère ambigu, où l’on peut trouver refuge et en même temps scruter la menace, lumière et ombre se poursuivent mutuellement entre les variations du bleu de Prusse prédominant. Les sujets représentés apparaissent sûrs et nostalgiques, maîtres de leur course mais seuls, dans une nature déserte et enveloppante. Des lieux liminaux qui marquent la frontière entre rêve et réalité, archétypes d’un inconscient qui aime jouer avec les fondements de la psychanalyse, des éclats de désir absolu et de retour à un état primordial, au caractère résolument contemporain, où les différences de genre et les contradictions culturelles sont délibérément précipitées dans le limbe du non-sens. Ici, parmi les coups de pinceau vifs et résolument identitaires, on se trouve dans l’ailleurs palpitant de couleurs froides enflammées où chaque chose se dévoile elle-même, se présentant souvent comme dépouillée et authentique, libre et abyssale.
Version EN.
“The moon has set", a short lyrical fragment by the ancient Greek poet Sappho who expresses a refined and melancholic nocturnal reflection (1st original edition : 6th century BC).
A visual rustling, impetuous, light and entrancing moves from the eyes of the spectator to an indefinite bodily vastness that envelops the air inside and out, between the interstices of the canvas and all around until it returns calamitously to its material incarnation, to the soft brushstrokes of the enveloping pictorial works of Tatiana Defraine.
Everything moves, supported by the wavy lines and targeted trajectories.
But where do these benighted riding figures come from and above all where are they headed ?
Here they are in a window of colour, taken in the timeless moment of their eternal journey, uninhibited, proud and naïve at the same time, daughters of the nature that cloaks them.
Their whispered and ethereal gestures seem to do nothing more than what that moment has : performing guided by hedonistic symphonies, between earth and sky.
In Horses and Ghosts, the ground seems to tremble due to the bold and trotting ride, in perfect harmony with the typical rhythm of the flock of leaves on the trees, where, moved heartily by the pressing wind, everything dances. In this succession of metaphorical scenes of an ambiguous character, in which it is possible to find refuge and at the same time scrutinize the threat, light and shadow chase each other among the variations of the primeval Prussian blue.
The subjects represented appear safe and nostalgic, masters of their run but alone, in a deserted and enveloping nature. Liminal places that mark the boundary between dream and reality, archetypes of an unconscious that likes to play with the foundations of psychoanalysis, glimpses of desire for the absolute and a return to a primordial state, with a strongly contemporary character, in which gender differences cultural contradictions are deliberately thrown into the limbo of nonsense.
Here, among vivid and resolutely identifying brushstrokes, we find ourselves in the throbbing elsewhere of cold fiery colours in which everything praises itself, often presenting itself as bare and authentic, free and abysmal.