L’index des patiences

L’index des patiences, 2012
Béton, 500 x 250 x 20 cm
 
Vue de l’exposition « Armez les toboggans », Le Quartier Art Center, Quimper
Commissariat Keren Detton
Production Centre d’Art Le Quartier / Courtesy Galerie Acdc

 

[...] L’Index des patiences se présente sous la forme d’un mur en parpaings de béton cellulaire, percé d’un trou à hauteur d’yeux. Cet orifice semble obtenu du patient grattage/frottage manuel de la surface et, n’était son aspect bien fini, il ferait penser à ces surfaces usées par les mains qui les ont touchées : les pieds de Saint Pierre à Rome ou les modestes statues et fontaines des chapelles bretonnes contre lesquelles, par exemple, les femmes venaient frotter leur ventre afin de s’assurer la fécondité. Sur le plan de la sensation visuelle, il peut certes évoquer certaines pièces d’Anish Kapoor (Sister Piece of When I am Pregnant, 2005, du musée de Nantes par exemple), mais c’est à la porte percée du Duchamp de Étant donné... qu’on songe le plus naturellement. Point cependant ici de belle ouverte et offerte mais, de manière apparemment plus déceptive, d’un côté le mur d’en face, de l’autre, l’entrée de l’exposition et la perspective du hall d’accueil. Pour l’artiste, cela évoque aussi bien une sculpture d’un certain Matvey Manizer (représentant un garde frontière accompagné de son chien) dans le métro de Moscou, que les gens caressent tous les jours, que le trackpad de son ordinateur, marqué par le frottage récurrent du doigt. Incongrument placé au milieu de la salle et incluant l’une des colonnes métalliques du lieu, le mur s’affirme davantage comme un signe d’architecture que comme une architecture en soi ; il s’agit en fait, comme toujours chez l’artiste, d’une sculpture et, plus encore, d’un lieu d’expérience. Tout ici, en effet, signale la présence et l’action du corps : le soin apporté à l’agencement des parpaings, le creusement de l’orifice scopique. [...]

Jean-Marc Huitorel, « Un sculpteur du 21e siècle », 2012 (extrait)

 

 

 

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