Chamalot

Famille Bras cassés, 2009
Peinture sous verre acrylique, 200 x 300 cm
Résidence d’artistes Chamalot 2009
Collection particulière

« Dans ce tableau, j’ai souhaité mettre en tension la virtuosité de ma technique avec l’ironie de la maladresse et de la chose cassée. Plusieurs types de représentations circulent dans les quatre espaces rassemblés en une seule image.
Dans le premier espace en haut à gauche, l’escalier du bâtiment n’a pas de marche, rendant l’accès inopérant. La nature environnante apparemment pixellisée, rappelle les recherches picturales sur la défragmentation de la lumière.
En haut à droite, deux manières de traiter les formes sont proposées, l’une réaliste et l’autre plus géométrique. Cette géométrie fait le lien avec l’espace inférieur droit où des formes géométriques se déploient. Celles-ci participent à la fois d’une éventuelle construction - comme pourraient le faire des jeux d’enfants - et des fragments, des parties cassées d’une possible destruction.
Dans l’espace inférieur gauche, au premier plan, un couple masqué et réaliste, voire photogénique, a les bras cassés. Leurs mains hors champs nourrissent l’intrigue. Le traitement des masques est différent. Celui de la femme est un morceau de peinture en soi, la représentation d’un masque peint alors que celui de l’homme est plus réaliste. »

Muriel Rodolosse

 

Fumée de nuages, 2009
Peinture sous verre acrylique, 200 x 300 cm
Résidence d’artistes Chamalot 2009

« ... je vous construirai sans plan et sans ciment
Un édifice que vous ne détruirez pas,
Et qu’une espèce d’évidence écumante
Soutiendra et gonflera...
Avec de la fumée, avec de la dilution de brouillard
Et du son de peau de tambour,
Je vous assoirai des forteresses écrasantes et superbes,
Des forteresses faites exclusivement de remous et de secousses... »

Henri Michaux, « Contre ! », La nuit remue, 1967

"Dans son poème « Contre ! », Henri Michaux oppose la puissance architecturale des forteresses et leur indestructibilité à l’immatérialité de leur construction. Cela m’a amenée à penser une proposition dans laquelle les bâtiments seraient à la fois lourds et légers, bancals, instables, volants, machine à produire des nuages et à refléter l’espace. Le tableau devient lui-même espace de projection, un plan vitré sur lequel les reflets donnent forme à des bâtiments aux matières et aux couleurs de ciels et de nuages. La technique du fixé sous verre acrylique est ici mise en relation avec l’ironie de la représentation d’une architecture immatérielle, fragile, flottante et réfléchissante.
Immatérielle … dans mon travail, la peinture est mise à distance, sa matérialité n’est pas dévoilée. On peut alors s’interroger sur la nature de l’œuvre exposée. L’œuvre oscille entre une matérialité « classique », celle du tableau où la peinture est posée sur un support – et « l’immatérialité » puisque ce que l’on regarde est une empreinte inversée sur un support transparent.
Je pense que la peinture prend ici sa dimension, dans la tension de cette opposition.
Fragile … c’est l’aspect « poïétique » de mon travail.
Flottante … à l’image des édifices,sans ancrage au sol, flottants malgré leur densité, la peinture se détache de toute classification.
Réfléchissante … parfois comme un miroir. Mes tableaux réfléchissent la réalité du lieu d’exposition, absorbent le spectateur et lui rendent son regard ; cette ouverture sur l’extérieur est intégrée dans la nature du travail. A la fois espace de réflexion et de projection, le tableau révèle la légèreté des bâtiments dans l’épaisseur du support autant que dans sa transparence. Écran sur lequel projeter nos réflexions, l’œuvre est aussi un lieu pour penser l’architecture dans son rapport à la matérialité et à l’environnement non immédiat."

Muriel Rodolosse

 

© Adagp, Paris