La mémoire cornée

L’évocation des souvenirs liés aux origines commencent souvent par des phrases furtives et banales... comme des détails sans importance.
Des phrases comme ça, qui sonnaient comme des amorces d’histoires étranges... des amorces de bon vieux polar dont on aimerait connaître la fin mais impossible.
Tout à commencé avec une phrase fameuse comme ça, entre un bol de soupe au chou et un beignet de nouille...
Comme celle-ci par exemple : « Pépé Faustino a été accusé de meurtre tu sais, alors on a rapidement réussi à fuir l’Espagne pour arriver en France... Au début, nous devions partir en Argentine puis finalement on est resté là... »

La mémoire cornée est un récit graphique où s’entremêlent diverses histoires familiales liées à ses origines, des objets qui dialoguent, des souvenirs comme des étincelles qui disparaissent et réapparaissent dans un autre temps...
D’un côté, l’Algérie comme eldorado d’une famille de travailleurs espagnols (arrivés à Rahouia, Montgolfier), et de l’autre côté, l’arrivée de mon grand-père paternel, Julian Benito qui a déboulé du côté de Lodève.
Ces deux histoires distinctes mais liées comme deux aimants, m’ont donné comme base de recherches, deux espaces inspirants, luxuriants de sens et de possibles fictionnels. Cela faisait un bon moment que je voulais me plonger dans ce boulot mais je n’ai jamais osé, pourquoi je ne sais pas. Une récente exposition (commissariat Anne Cécile Paredes) intitulée DFI, Document Fictionnel d’Identité m’a permis d’enfin amorcer ce travail. Ce que vous allez voir là, n’en est qu’une infime partie, le storyboard d’un western politico romantico spaghetti qui se déroulerait dans ces décors secs et arides d’Espagne ou d’Algérie. C’est un making-of, un générique long imagé.
Comme un film.
Comme un livre.

La mémoire cornée est un livre fictif et théorique du « Vas voir là-bas si j’y suis ».
Je tente délicatement, de manier avec beaucoup d’amour, mon archéologie familiale et populaire au travers d’archives photographiques et autres documents d’identité, des témoignages, souvenirs d’enfances puis enfin mes souvenirs à moi.
Des milliers de traits comme des strates d’une histoire commune... Du spiritisme à l’encre...

Camille Lavaud, 2015

 

Sieste Iglesias de Trabancos, 2015
Encre de Chine et pointe 0,3 sur papier, 32 x 42,5 cm
Récit graphique en 15 dessins

 

La Montre de Jeanne, 2015 (Planche 1)
31,23 x 43 cm

 

La Montre de Jeanne, 2015 (Planche 2)
55 x 39 cm

 

Nature Morte 1, 2015
55 x 39 cm

 

Rahouia, 2015
55 x 39 cm

 

Revernay & Cie, 2015
55 x 39 cm

 

© Adagp, Paris